Nouvelles de Science-Fiction

 

 

 

Virus nucléaire

 

 

 

De Julian M. et Alexander S.

 

 

Chapitre 1

                                         La découverte du virus                                        

 

Une sonnerie retentit, pareille à une alarme à incendie, et des haut-parleurs, dissimulés dans les murs, une voix tonna :

«Il est 6h30. Vous devez vous réveiller. Il est 6h30. Vous devez vous… »

 

Le Dr. Wilson se tourna dans son lit en poussant des borborygmes. Ce n’est pas qu’il était contre ce système de réveil. Non, bien au contraire. Ses grands-parents lui avaient une fois raconté que, jadis, de leur temps, les réveils étaient individuels. Inadmissible pour lui. De plus, il arriverait même que des gens soient en retard au travail parce que leurs réveils étaient mal programmés, ou parce qu’ils ne les entendaient pas. Inadmissible aussi. Non, ce qui le gênait réellement, c’est que les haut-parleurs s’allumaient si tôt. Il aurait bien aimé avoir un petit quart d’heure de repos de plus… Mais il n’eut pas le temps de rechigner longtemps : le robot-cafetière  lui avait déjà préparé son café matinal et les toasts exhalaient une odeur délicieuse…

Comme chaque matin, le docteur Wilson se leva lentement, marcha en titubant jusque dans sa salle de bains. Un coup d’œil sur la glace suspendue devant le lavabo lui apprit la température et l’humidité extérieures, ainsi que la pression atmosphérique…et qu’il avait besoin d’une visite chez le coiffeur ! Ce n’est pas qu’il faisait spécialement attention à sa coupe de cheveux, loin de là. Mais ce n’est tellement pas pratique de travailler avec des cheveux longs dans une salle ultra propre… Quand il eut fini de se raser, il descendit dans la salle à manger, où l’attendait un petit déjeuner, préparé par les soins des machines, et encore bien chaud. Dès qu’il s’assit confortablement sur son siège matinal, l’écran mural, accroché en face de la table, s’alluma sur les nouvelles. Après une courte musique, la présentatrice prit la parole.

« San Antonio News, bonjour ! Il est 7 heures précises, il fera 298.6 Kelvin maximum ici aujourd’hui. Le taux d’humidité est de 65-73%. Mais maintenant, place aux infos -petite musique- Mexique. 10 personnes ont été contaminées par un nouveau virus qui semblerait être proche de celui de la grippe. Les scientifiques semblent être d’accord sur le fait que ce nouveau virus semble assez agressif et facilement transmissible d’humain à humain. Si un médicament n’est pas rapidement produit, il pourrait causer une pandémie avec une forte mortalité, comme la grippe espagnole de 1918 ou, plus récemment, la grippe aviaire de 2007. De plus, les médicaments habituels anti-grippaux comme le Tamiflu©  semblent inefficaces sur cette nouvelle mutation. Les recherches pour un nouveau médicament vont donc probablement être transférées au CARM (Centre Américain de recherches scientifiques)  pour que le Centre trouve rapidement une solution à ce problème qui pourrait devenir d’envergure mondiale… »  Richard leva les yeux de son toast. CARM ? Elle avait dit CARM ? Le docteur travaillait au CARM…Peut-être ce virus pourrait changer le cours de ses journées, qui commençait à devenir monotone…

 

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Quand il eut fini de manger, le docteur s’habilla rapidement mais, par manque de moyens, il était obligé de le faire manuellement. Mais il projetait d’acheter un de ces placards-changeurs, qui vous habillent littéralement de la tête aux pieds. Il y en avait aux soldes… Perdu dans ses pensées, il sortit, pendant que le robot-cafetière se chargeait de débarrasser la table. Une fois dehors, Richard posa machinalement sa main sur la surface de scan de la porte afin de la fermer automatiquement et sûrement. Depuis que le président américain avait perdu les clefs de sa maison, ce système biométrique fut perfectionné au point de remplacer complètement les serrures et autres verrous…

 

Lentement, il se dirigea vers l’arrêt de bus. Il le prenait presque chaque jour, aller et retour, car, lui, simple chercheur, n’avait naturellement pas de voiture. C’était trop cher, uniquement quelques-uns de ses supérieurs avaient de petites voitures à énergie solaire. De plus, il les trouvait inutiles. S’il voulait aller quelque part, il y avait toujours le bus…. Quinze minutes après, celui-ci s’arrêta devant le CARM.

 

C’était un bâtiment composé de laboratoires à perte de vue, 5000m² de petites boîtes grises éparpillées, toutes en béton armé, solide et résistant (et moche aux dires d’aucuns, mais à vrai dire, le Dr. Wilson s’en fichait pas mal…). Vue de haut, cela ressemblait à un véritable mouchetis de petites tâches géométriques qui semblaient dispersées au hasard ; mais une logique subsistait, malgré tout, derrière cet ordre chaotique.

D’un pas décidé, le chercheur avança en direction du portail qui s’ouvrit à son approche. Les empreintes digitales d’un si grand nombre de personnes seraient trop compliquées à enregistrer ; un badge spécial remplissait donc la fonction d’identificateur personnel. Il salua brièvement le gardien, et se dirigea vers son laboratoire. C’était, comme la plupart des bâtiments, un gros bloc, assez aplati, en béton gris. L‘y attendaient une armada d’appareils scientifiques, ainsi que quelques-uns de ses collègues de travail, qu’il salua en rentrant. « Je ne sais pas si tu l’as entendu aux infos, mais on a ici le premier échantillon de virus d’une maladie…bizarre. » commença Mr. Heinz. C’était un jeune étudiant, en train de préparer sa thèse, et qui était assis devant un ensemble d’une dizaine d’écrans d’ordinateur. Il était encore assez jeune, de taille moyenne, avec des cheveux courts mais ébouriffés, et des yeux gris.

« Cela ressemble au virus de la grippe, mais les mutations ne sont pas naturelles. Elles n’ont pas l‘air artificielles non plus, vu qu’elles sont trop aléatoires…et que ce serait trop compliqué…Non, je pense que cette mutation est une mutation naturelle, mais causée par une influence externe…et nucléaire. Cela ne peut se produire uniquement dans une zone irradiée…encore faudrait-il savoir où c’est possible, puis… » Mais déjà, Dr. Wilson ne l’écoutait plus : il s’était mis sur un poste informatique libre et réfléchissait comment hacker le site du Ministère de l’Armée des Etats-Unis. S’il pouvait trouver des informations, alors, ce serait là-dessus…Un quart d’heure et deux tasses de café plus tard, il y était. Il parcourut rapidement le sommaire du site, avant de s’arrêter sur un menu qui lui semblait intéressant : Secrets militaires. Mais ce qu’il trouva là le fit presque se pâmer : en 2036, en fin fond de l’Amazonie, une série de tests avec des armes nucléaires de nouvelle génération avait mal tourné…Tout le camp, qui hébergeait quelques centaines de tonnes d’armes atomiques avait sauté. Résultat : une zone extrêmement irradiée au milieu de cette forêt tropicale. Des animaux y vivaient certainement… Or, les médecins contaminés revenaient justement d’une expédition en Amazonie, et avaient analysé des animaux morts mystérieusement .Si un primate avait attrapé la grippe dans cette zone, le virus pourrait, grâce à cet hôte, muter en  n’importe quoi. Aussi en une nouvelle souche pouvant être contractée par l’homme…mais contre laquelle aucun anti-corps ne sera formé par l’organisme et ne POURRA certainement pas se former. C’est pour cela que les médicaments habituels ne marchent pas et ainsi, le virus pourrait proliférer dans le corps humain sans rencontrer d’obstacle, et presque tous les humains qui l’attraperont seraient, outre contaminés…condamnés…Et s’il ne trouvait pas rapidement un antidote ou un vaccin, il pourrait rapidement y avoir une pandémie, la pire qu’ait connue l’humanité…


Chapitre 2

Les premiers essais

 

Les sonneries retentirent, toujours pareilles à des alarmes à incendie. Mais ce jour-là, leur effet sur le Dr. Wilson fut différent…

Ces sept derniers jours, à force de recherches intensives, Richard et son équipe avaient réussi à localiser et isoler un gène du virus. Ils ont donc pu réaliser une sorte de missile-médicament, guidé par ce gène, qui pourra identifier, localiser et enfin…détruire le virus. Ils avaient injecté le virus il y a deux jours à quelques souris de laboratoire. Et aujourd’hui, ils avaient les résultats : si les souris sont en forme et…vivantes, le médicament a de fortes chances d’être efficace (une forte fièvre apparaît généralement au bout d’une dizaine d’heures après l’incubation…), et on pourra passer aux essais sur humains. Dans le cas contraire, de nouvelles recherches seraient nécessaires…mais entre-temps, le virus aurait le temps de muter et donner naissance à une autre souche, immunisée contre les médicaments mis au point. Ils faudra donc faire de nouvelles recherches, mais le virus pourrait re-muter, et le cercle vicieux recommencerait…Non, les résultats du test étaient d’une importance primordiale. Ce qui expliquait peut-être la vivacité inhabituelle avec laquelle le docteur sauta de son lit au premier son qu’il perçût…Il se hâta vers la salle de bains, se rasa rapidement, puis courut vers la salle à manger. Comme chaque matin, en s’asseyant, il alluma automatiquement l’écran mural en même temps. Mais ce jour-là, quelque chose lui sembla différent, et il ne tarda pas à trouver la cause de cette impression vague : la présentatrice de San Antonio News avait sauté la météo…

« Nous sommes en situation de crise. Le virus, quoique maintenant mieux connu, a déjà contaminé 10 000 personnes en l‘espace d’une semaine. À peine quelques centaines ont survécu. Il semblerait que le virus se manifeste avec une forte fièvre quelques heures après la contamination, et celle-ci dure généralement deux à trois jours. Puis arrive une grippe, mais le corps, épuisé après le combat contre la fièvre, n’a plus assez de ressources pour guérir de ce nouveau mal, et l’effet peut être comparable à celui d’une rechute de grippe, mais bien plus grave. Si un médicament efficace n’est pas rapidement mis au point, le gouvernement pourrait faire évacuer tout le sud des Etats-Unis d’Amérique… »

Encore une fois, Richard leva les yeux de son toast. Faire évacuer toute la région ? Ce serait la catastrophe pour lui…Une raison de plus pour que le remède fonctionne…

 

 

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Le Dr. Wilson arriva sans encombres au CARM. Il n’y avait encore personne. Lentement, il se dirigea vers son laboratoire, le cœur battant comme s’il voulait exploser. Après un temps qui lui sembla une éternité, il arriva enfin à la cage des souris. Tout lui semblait calme…Il s’approcha un peu plus et vit une des souris remuer un peu. Elle l’observa attentivement, puis commença se diriger vers la mangeoire. Les souris avaient survécu ! Si elles avaient été contaminés, elles n’auraient même pas eu la force de remuer, ne serait-ce qu’un peu…Le médicament était fonctionnel ! Pour la commercialisation et la distribution de ce médicament, et donc le sauvetage de l’humanité, il n’y avait qu’un pas à franchir : l’essai sur des humains. Mais ce qu’il ne savait pas, c’est que cette étape serait dure à franchir, bien plus qu’il ne le pensait…


Chapitre 3

La conférence à Londres

 

« Les passagers du vol E348 en  provenance de San Antonio sont priés de venir chercher leurs bagages » dit une voix fluette mais claire par les haut-parleurs. Wilson venait d’atterrir à Londres il y a quelques secondes à peine. Ses collègues l’avaient choisi pour présenter le médicament qu’ils avaient mis au point aux autorités mondiales et à l’OMS.Ce qui pouvait expliquer la nervosité du docteur. Mais quelque chose d’autre le tracassait : le médicament avait été uniquement testé sur des souris…et rien ne pouvait lui dire si le médicament marchait aussi sur les humains. Si ce n’était pas, le cas, il avait un problème. Un gros problème. Et le reste de l’humanité probablement aussi…Il décida donc, pour oublier sa nervosité et ne pas finir complètement à bout de nerfs le soir de la conférence, de passer l’après-midi au cinéma 4D de Londres. Contrairement aux vieux cinémas démodés, les cinémas 4D permettaient au spectateur de voir, entendre, sentir et même de ressentir tactilement l’histoire racontée par le film. Bien sûr, il y en avait déjà deux ou trois en usage au début du 21ème siècle, mais pas aussi perfectionnés. Mais l’effet que Richard espérait de la séance de cinéma ne fut pas totalement réalisé : en sortant de la salle, il  avait déjà oublié la moitié du film…Lentement, il se dirigea vers la voiture qui avait été spécialement mise à sa disposition. Le chauffeur l’attendait déjà. Quelques minutes plus tard, il s’arrêta devant le Palais des Congrès de Londres. Même vu de dehors, on voyait que quelque chose d’important se préparait : des scientifiques venaient et sortaient, et des policiers surveillaient chaque entrée. « Un peu trop de sécurité pour pas grand-chose » se dit le Dr. Wilson en s’approchant. Son discours portera uniquement sur l’utilisation du médicament et les recherches que lui et son équipe ont faites dessus. Mais en réfléchissant, il trouva quand même la cause de cette sécurité presque absurde : le principal responsable du virus était une erreur du gouvernement, et si quelqu’un d’autre était au courant, et, comble du malheur, vendait cette information à la presse, il y aurait des émeutes, le gouvernement pourrait être renversé…non, il vaudrait mieux que toute la vérité ne soit pas divulguée…En entrant dans ce grand bâtiment, un policier lui demanda assez froidement de s’identifier. Mais son visage s’éclaira dès qu’il sut qu’il s’agissait du Dr.Wilson. « Vous ? » l’apostropha-t-il  « Le docteur Richard Wilson du CARM ? Tous les gens haut placés ne parlent que des recherches que vous et vos confrères avez faites et du médicament que vous avez mis au point. Allez-y, entrez, on vous attend déjà ! » Un peu déconcerté par cette nouvelle rencontre qui ne fit qu’accroître sa nervosité, Richard avança timidement dans le hall de réception…

 

Le hall se présentait sous forme d’une grande salle avec un plafond haut. Au fond, il y avait une sorte de petite cabine occupée par la réceptionniste. Sur les côtés, deux escaliers entortillés menaient à l’auditorium, au premier étage. C’est là que le Dr. Wilson tiendra son discours. Et d’après sa montre, dans moins d’un quart d’heure…Il décida donc de se familiariser un peu avec cette grande salle. En entrant, la première chose qu’il remarqua était un gigantesque écran de cinéma suspendu sur le mur du côté opposé des gradins. Il servait sûrement lors des séances de vidéo projecteurs…Les gradins, quant à eux, étaient placés à la manière d’un amphithéâtre, et les sièges étaient en métal peint, ce qui donnait un air de modernité à la salle.

Le Dr.Wilson n’avait à présent plus beaucoup de temps pour se préparer. Il sortit quelques feuilles imprimées de sa chemise et les déposa sur la grosse table au milieu de la table, devant ce qu’il nomma l’ « écran de cinéma ». Il les relut rapidement, pour être sûr de ne rien oublier lorsqu’il présenterait son médicament puis…

…puis vinrent les premiers arrivants. Et d’après leurs habits, ce n’était pas n’importe qui, tous sans exception étaient en cravate et smoking, ce qui faisait un contraste assez conséquent avec le docteur, qui n’avait rien trouvé d’autre à mettre qu’une paire de joggings et un pull. Mais passons. Après avoir attendu que tous se soient assis et avoir salué poliment la petite assemblée de « gens haut placés » réunis, le jeune scientifique commença le véritable discours, visiblement nerveux quoiqu’il ait repris un peu plus d’assurance: 

« Une nouvelle mutation de la grippe sévit depuis quelque temps, qui a déjà fait plus de 50 000 morts – murmures gênés et parfois horrifiés dans les tribunes – mais, et le docteur Wilson insista bien sur ce dernier mot, non parce qu’il trouva qu’il avait une signification importante, mais simplement pour que ses auditeurs retrouvent un peu  leur calme et parce que cela produisit un effet…dramatique, mais mon équipe du CARM et moi-même avons réussi à mettre au point un médicament qui a déjà prouvé son efficacité sur plusieurs souris de laboratoire. J’aimerais – nous aimerions essayer ce produit sur des humains également. Mais pour cela, il me faut votre accord et disons…un petit budget de départ. Donc je vous le demande : ai-je votre autorisation pour tester ce produit sur des humains ?

Visiblement interloqués par cette demande directe, presque audacieuse d’un simple…chercheur, ses interlocuteurs mirent un certain temps avant de répondre à cette question, dont la réponse semblait pourtant claire… Puis, un des hommes se leva des tribunes et s’adressa à Richard :

« Nous sommes d’accord avec vous sur la gravité de la situation et donnerions notre accord mais nous avons quelques points que nous voudrions éclaircir. Premièrement : est-ce que ce produit est vraiment efficace et est-ce qu’il le sera sur les humains ? »

Un peu déconcerté par une telle question, le docteur s’adressa promptement à son nouvel interlocuteur :

« Sur les douze souris sur lesquelles nous avons testé le produit, onze ont survécu. Si l’on considère que le taux de mortalité est de 50% - je sais, c’est énorme mais c’est un fait, rajouta-t-il en réponse aux nouveaux murmures, mais qui étaient de terreur cette fois-ci, ce médicament a un taux d’efficacité d‘approximativement 5/6, ce qui est déjà beaucoup. Nous n’avons pas encore fait la comparaison avec les placebos, mais ils ne doivent pas servir à grand-chose dans notre cas. Surtout sur des souris…En ce qui concerne l’efficacité du produit sur les humains, le médicament est une sorte de missile guidé par un gène du virus. Ce « missile » ne peut donc être détraqué que s’il trouve une copie exacte de ce gène quelque part dans l’être vivant dans lequel il est envoyé. Or, le corps humain n’en possède pas. Du moins, nous espérons qu’il n’y en ait pas, mais la probabilité qu’un tel gène existe dans le corps humain tend vers zéro… »  Et il y avait une bonne raison à cela, mais Richard se gardait bien d’en parler : il voulait encore garder un atout dans sa manche…On ne sait jamais…

L’homme en smoking noir hocha furtivement la tête d’un air approbatif, puis s’adressa de nouveau à Richard :

« Bien. Il y a néanmoins un autre point sur lequel nous aimerions vous questionner : que sait-on a ce jour sur ce virus ? Ne vaudrait-il pas mieux investir davantage sur des analyses ou expériences sur lui, au lieu d’essayer déjà des médicaments qui pourraient ne pas fonctionner, quoique vous sembliez être sûr qu’ils seraient efficaces ? »

Le Dr. Richard Wilson attendait déjà cette question avec impatience et parla d’un ton sûr de lui :

« Nos recherches nous ont conduit à ces conclusions : les mutations du virus sont d’une origine nucléaire. Il semblerait aussi que ces mutations aient eu lieu en Amazonie. Si vous ne vous en souvenez plus, je vais vous rafraîchir un peu la mémoire : en 2036, il y a eu une série de tests sur des armes nucléaires de destruction massive utilisant des substances hautement irradiées. Le virus a pu muter dans cette zone-là en une souche d’origine non naturelle, elle est donc extrêmement dangereuse car totalement inconnue de notre système immunitaire. Le résultat des tests sera donc très important. S’ils réussissent, nous aurons en main un médicament efficace contre le virus. Sinon…nous aurions un véritable problème. Le virus pourrait causer bien plus de dégâts que les mutations de 1918 ou de 2007… »

S’il y avait eu une personne dans la salle qui n’était pas encore totalement convaincue de l’importance des travaux du CARM ou des tests à venir, elle l’était maintenant. Mais les raisons de cette nouvelle attitude n’étaient pas les mêmes pour tous : les membres de l’OMS voulaient à tout prix éviter une épidémie grave, et les membres du gouvernement américain que le reste du monde sache qu’ils étaient eux les véritables coupables de ce fléau…


Chapitre 4

Les tests décisifs

 

Après avoir fait la présentation du médicament, Richard resta encore quelque temps à Londres. L’OMS avait décidé, en accord avec les chefs de gouvernements, de faire une série d’expériences sur 200 personnes sur lesquelles le virus avait été détecté. Il n’avait plus qu’à en attendre les résultats…

Le lendemain de la conférence, le docteur reçut une carte postale en provenance de San Antonio. Sur le recto, on voyait la plage et la mer, pendant un coucher de soleil… Etonné, il tourna rapidement la carte et la lut rapidement, mais attentivement…

« Salut Richard !

On ne parle plus que du virus dans notre région. Et un nom apparaît souvent dans les discussions : le tien… C’est vrai que tu as réussi à trouver un remède ? Est-ce qu’il fonctionne ? Le gouvernement parle d’ores et déjà de faire évacuer toute la région s’il y avait des problèmes…L’idée ne me plaît pas de devoir partir vers le nord en laissant tout là-bas…Alors, j’espère avec toi que ton médicament marche ! Sinon, notre fils grandit vite ! Il arrive déjà à marcher et dit ses premiers mots…En tout cas, il aura de quoi être fier de son papa !

Ciao et j’espère que tu vas revenir rapidement…

Alicia »

Alicia…ils s’étaient fiancés il y a deux ans et voulaient se marier très bientôt…Tout le remue-ménage à cause de cette épidémie avait un peu contrecarré leurs plans de mariage. Mais dès qu’il rentrerait, Richard se promit de s’occuper de cela le plus rapidement possible…S’il pouvait rentrer…Non, si les expériences échouaient, ce ne serait vraiment pas pratique pour lui…Et en l’occurrence, pour l’humanité aussi.

S’il savait ce qui allait lui arriver…

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Les trois autres jours se passèrent pour Richard, dans l’attente et dans l’angoisse… Il n’arrivait plus à dormir la nuit et était même parfois obligé de prendre de légers somnifères…Puis vint le grand jour où l’OMS annonça enfin les résultats. C’était un soir d’hiver gris et nuageux, Richard allait s’en souvenir…jusqu’à la fin de sa vie. Les personnes présentes lors de la présentation étaient de nouveau réunies dans le Palais des Congrès de Londres. La sécurité étant encore plus présente que lors de sa première visite. Des policiers en civil patrouillaient dans le parc du Palais, et l’entrée était gardée par une escouade de policiers. Richard dut prouver son identité au moins quatre fois avant de pouvoir parvenir à la salle de conférence. Il s’assit, légèrement énervé, au premier rang. Les membres de l’OMS arrivèrent peu après. La tension dans la salle atteignit son paroxysme. Puis, la sentence fut rendue. Sur les 200 personnes sur lesquelles le test avait été fait, 100 n’avaient eu qu’un simple placebo (cf. note plus haut) mais les 100 autres avaient reçu le médicament. Résultat : dans le groupe des « placebos », 49 personnes ont survécu. Dans le groupe avec le médicament ont survécu…51 personnes.

Le médicament était inefficace…

Le premier sentiment qu’éprouva le docteur Wilson fut la surprise. Puis vinrent à tour de rôle la colère, la déception et…le désespoir. Son médicament avait échoué, une semaine de travail perdue mais pire que ça : une pandémie pouvait se déclarer d’un jour à l’autre…

 

Après son échec, Richard n’eut d’autre solution que de repartir à San Antonio. Mais une bien mauvaise surprise allait l’y attendre… Dès qu’il mit le pied hors de l’avion, il sentit que quelque chose avait changé depuis son départ. Le ciel avait encore la même couleur, les arbres le même vert et l’air la même odeur (en l’occurrence aucune…) mais les rues et en particulier l’aéroport semblait plus déserts, et les gens qu’il voyait plus pressés. En prenant le bus pour revenir chez lui, il comprit enfin ce qui allait s’était passé ou plutôt ce qui allait se passer : il se souvint des paroles d’Alicia : « Le gouvernement parle d’ores et déjà de faire évacuer toute la région s’il y avait des problèmes…L’idée ne me plaît pas de devoir partir vers le nord en laissant tout là-bas ». Toute la région allait être évacuée. Et à ce moment, Richard prit une décision, qui allait déclencher pur lui le début de la fin : il resterait à San Antonio et trouverait un médicament efficace, quoiqu’il arrive… Cette décision parait complètement folle, dérisoire. Mais Richard se sentait coupable d’avoir causé la mort de milliers de personnes parce que son remède était inefficace et dans un état d’esprit pareil, il est difficile de réfléchir raisonnablement. Et un autre évènement allait également enfoncer le Dr. Wilson un peu plus dans sa folie : en rentrant chez lui, il trouva dans sa boîte plusieurs mails d’Alicia : le premier lui souhaitant bonne chance au cas où il lirait encore ce mail avant son départ, le deuxième disant qu’elle avait un peu de fièvre et qu’elle avait appris l’échec de Richard et qu’en conséquence qu’elle le soutenait, puis un dernier mail où Alicia disait que son état de santé commençait à s’aggraver, qu’elle craignait d’avoir une petite grippe et qu’elle allait déménager dans le nord. Puis plus rien. Il n’y avait plus qu’un mail de l’hôpital d’Austin. Le voilà :

« Bonjour Monsieur Wilson

Une personne du nom d’Alicia Wilson est décédée hier d’un virus de grippe particulièrement virulent connu sous le nom de « virus nucléaire ». N’ayant pas pu être reconnue, nous savions d’elle uniquement qu’elle était fiancée avec un certain Dr. Richard Wilson habitant San Antonio. Nous voulions simplement l’en informer.

Si ce mail ne vous concerne pas, veuillez l’ignorer.

 

Dr. Kerry, chef de l’hôpital d’Austin

 

Ce mail finit par faire sombrer Richard dans la folie…

Pendant ce temps, à San Antonio. La ville était en émoi. On voyait les gens courir dans les rues, leurs maigres bagages à la main. La plupart des cas du virus avaient été recensés plus au sud, mais le gouvernement avait donné l’alerte : la ville devait être évacuée si l’on voulait éviter une propagation de l’épidémie. Cette agitation dura deux jours. Après cela, un visiteur distrait qui serait allé à San Antonio aurait pu croire à une ville fantôme. Mais un homme restait tout de même dans la ville : le Dr. Richard Wilson… Jour et nuit, il travaillait au CARM. Il avait même installé un lit au centre ; cela lui évitait de faire tout le chemin chaque jour. Il travaillait une quinzaine d’heures par jour, ne prenant de repos que pour manger et dormir. Il cherchait l’erreur sur son médicament. Mais il n’en trouva aucune : tout était comme il devrait l’être, le médicament devait fonctionner. Et pourtant…il ne l’avait pas.

Etait-ce parce qu’il l’avait contractée au CARM par accident, ou parce que l’épidémie avait déjà atteint San Antonio, ou était-ce parce que son système immunitaire était affaibli par le stress ? Toujours est il que, une semaine après son retour à San Antonio, le Dr. Richard Wilson mourut d’une maladie que peu de personnes connaissaient mieux que lui : la grippe nucléaire…

Mais son histoire n’allait pas s’arrêter là. À Londres, un docteur de l’OMS analysa les tests et le médicament. Il arriva à la conclusion suivante le médicament devait être administré au malade au plus tard deux jours après sa contamination. Or, les symptômes du virus n’apparaissent généralement vers le troisième voire quatrième jour. Sa conclusion allait se révéler exacte : après une autre série des tests, des personnes étant cette fois-ci « contaminés » pour l’expérience, il y eut une mortalité de moins de 10%. Le médicament était efficace. En un mois et demi, le virus a fait plus de 350 000 morts. Il a finalement pu être vaincu par un médicament développé par le Dr. Wilson. Mais celui-ci avait succombé avant d’avoir su qu’il avait sauvé l’humanité, en croyant de l’avoir condamnée…Ironie du sort…Toujours est-il que Richard Wilson entra dans l’Histoire, en tant que sauveur, au même titre que Jean Louis Pasteur ou Robert Koch…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

FIEVRE ROUGE SUR MANHATTAN

 

De Camille S. et Camille L.

 

 

 

Nous sommes en l’an 2234, Mike Delfino, un jeune New Yorkais de 27 ans et son épouse Rachel, vivent paisiblement avec leurs deux enfants, Antoine âgé de 3 ans et demi et Océane, bébé de 6 mois, dans une banlieue chic de Manhattan.

 

Mike Delfino est gérant d’une grande chaîne d’hôtels qui porte son nom « Delfinos Hotels », Rachel quant à elle , travaillait dans le mannequinat jusqu’à ce qu’elle ait son premier enfant.

 

Mike et Rachel sont aisés mais ne s’en vantent pas pour autant. Ils ont des amis de longue date, Loïc et Gabrielle Warner, de condition plus modeste, qu’ils voient régulièrement.

 

 

Ces derniers ont d’ailleurs invité les Delfino dans une forêt proche de Manhattan pour pique-niquer. En cette belle journée d’été, où le soleil règne sur les arbres de Rainforest, les deux couples discutent tranquillement, en regardant jouer leurs enfants.

 

Après avoir mangé, Mike et Loïc prennent leur voiture afin de se rendre dans un lieu propice au footing. Ils s’adonnent donc à leur passe-temps favori, mais au bout de trois quarts d’heure de course, nos sportifs, fatigués, décident de retourner à la voiture pour revenir près des femmes et des enfants.

 

Pendant ce temps, Rachel, Gabrielle et les petits sont partis se promener aux alentours du lieu de pique-nique car Antoine et Jordan veulent attraper des « papillonus-tritum » (petit papillon croisé avec un écureuil).

 

 

 

 

 

 

 

La nuit se met soudainement à tomber et le soleil se réfugie brusquement derrière un nuage colossal. La pluie survient finalement obligeant nos promeneurs à rentrer et à achever, bien tristement, leur paisible journée.

 

Mike et Loïc sont également surpris par l’averse.

 

De retour à la villa des Delfino, les deux jeunes femmes tentent de réchauffer les enfants, trempés par le déluge, à l’aide d’un feu de cheminée car malgré la saison, le temps s’y prête.

 

Mike et Loïc arrivent enfin à la maison et entrent directement dans le garage afin de rester au sec. A l’intérieur tout est étrangement calme, les enfants sont couchés et  Rachel et Gabrielle conversent au coin du feu ; mais l’heure de se quitter est venue et la famille Warner prend congé de ses hôtes.

 

La quiétude ambiante est alors brisée par les pleurs d’Océane. Mike et Rachel en s’approchant de leur fille découvrent d’horribles plaques rouges sur son cou et la température de son corps semble anormalement élevée.

 

Mike avec l’accord de Rachel, emmène Océane chez le médecin qui fort heureusement habite à deux pas. Celui-ci après l’avoir examinée attentivement ne diagnostique qu’un simple eczéma, qui ne semble pas préoccupant malgré la fièvre importante.

 

Mike récupère l’ordonnance établie par le docteur et se dirige vers la maison où hélas, une nouvelle mauvaise surprise l’attend. Rachel est également souffrante et présente les mêmes plaques rouges que sa fille sur le corps.

 

Il monte alors dans la chambre d’Antoine et s’aperçoit que lui aussi ne semble pas au meilleur de sa forme. Il est fiévreux et délire au fond de son lit.

Paniqué, Mike décide d’appeler Loïc pour connaître l’état de santé de Gabrielle et des enfants, mais la réponse de Loïc l’angoisse fortement car tous sauf lui présentent les mêmes symptômes.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Ils décident alors tous deux, d’emmener leurs familles respectives chez un spécialiste  afin d’avoir un autre avis. Le Docteur Recheaubow, dermatologue très compétent leur annonce qu’il ne peut en aucun cas s’agir d’eczéma, il opte pour un virus mais réserve son diagnostic et impose une hospitalisation de Rachel, Gabrielle et des enfants.

Le médecin  précise à Loïc et Mike qu’il est préférable de les garder en observation pour voir l’évolution de leurs symptômes. Il leur propose de rentrer chez eux mais les contactera régulièrement afin de leur donner des nouvelles.

 

Les hommes préfèrent rester ensemble afin de combattre leur inquiétude. L’attente semble très longue jusqu’à ce que le téléphone sonne 2 ou 3 heures après leur retour. Le médecin déplore une aggravation de l’état de santé des enfants. Il explique à Mike et Loïc que des spécialistes ont multiplié les examens et analyses diverses sur leurs enfants et leurs femmes, pour en savoir plus sur cet étrange virus.

 

Malgré les efforts des médecins, les plaques rouges se répandent de plus en plus vite sur toutes les parties du corps et la fièvre varie entre 40 et 42°.

 

Dans les jours qui suivent d’autres patients se présentent déjà aux portes des hôpitaux avec exactement le même symptôme (plaques rouges, forte fièvre pouvant atteindre 42°).

 

Les autorités de santé décident d’informer la population qu’une épidémie liée à un virus inconnu menace le ciel de New York mais sans aucune explication à ce jour quant à la nature de ce phénomène. Toutefois les chercheurs et l’état déploient tous les moyens pour répondre au mieux à cette question.

 

Mike et Loïc trop angoissés et inquiets décident d’agir eux aussi en essayant de se remémorer la journée du pique nique afin de comprendre ce qui a pu engendrer cette maladie. Tout d’abord ils se demandent si cela n’aurait pas un rapport avec la nourriture qu’ils avaient mangé ce jour là, si l’herbe ou si un produit toxique n’auraient pas un quelconque rapport avec ce phénomène.

 

Mais ils ne pouvaient en aucun cas être « les déclencheurs de ce virus » car ils avaient mangé exactement la même chose que les femmes et s’étaient eux aussi assis dans l’herbe. Et quant à un éventuel produit toxique ils auraient été touchés eux aussi.

 

Loïc se souvient alors d’un article dans le journal auquel il n’avait prêté aucune attention sur le moment, qui évoquait un phénomène astronomique très rare : l’anneau de Saturne entrait en collision avec la planète Orion et provoquait une fissure dans la couche d’ozone et cela ne se produisait qu’à chaque millénaire.

 

Il appelle alors le Docteur Recheaubow pour vérifier si ce phénomène n’est qu’une coïncidence ou s’il y aurait effectivement lieu de s’inquiéter. N’étant pas un expert en astronomie le médecin leur indique Mme Sky, spécialisée dans le domaine des planètes et des étoiles.

 

Loïc contacte donc Mme Sky qui leur explique cet étrange phénomène surnaturel, dès que l’anneau de Saturne est entré en collision avec la planète Orion cela a provoqué une fissure dans la couche d’ozone, et l’apparition d’une pluie subite mêlée à des substances toxiques.

 

D’après toutes les informations qu’elle a pu recueillir sur les magazines et sur Internet, ainsi qu’avec l’aide des médecins, Mme Sky a pu en déduire que le meilleur remède qui puisse guérir les familles projecteurs et Warner ainsi que la population de Manhattan, est le mélange d’une poudre spéciale trouvée seulement sur une météorite qui a atterri à Manhattan,( introduite au Metropolitan Museum of Art, le célèbre musée qui regorge de richesses, avec plus de 3 millions d’œuvres conservées) ajoutée à du lait d’Onosmodium (plante découverte en 2100) qui heureusement est une plante typique de Manhattan.

 

Loïc avertit donc Mike ainsi que le Docteur Recheaubow qu’il a peut être trouvé avec l’aide de Mme Sky un remède permettant de soigner les habitants de Manhattan.

 

Tout s’organise alors très vite, le Docteur Recheaubow décide que Loïc et Mme Sky devraient aller chercher la poudre de météorite car cette dernière a une autorisation spéciale pour utiliser certaines pièces du musée, et que Mike et lui-même iraient chercher la plante Onosmodium.

 

Quelques heures plus tard de retour au laboratoire, le Docteur Recheaubow mélange les deux composants pour faire le remède et injecte le médicament aux familles projecteurs et Warner chargées de tester l’efficacité du traitement.

 

Le temps passe et Mike et Loïc font les 100 pas dans les couloirs du laboratoire attendant le verdict du médecin. Soudain arrive le Docteur Recheaubow tout souriant, le remède est efficace : la fièvre est tombée et tous les symptômes du virus ont disparu.

 

Le Docteur décide d’un commun accord avec Loïc et Mike d’avertir les autorités ; celles-ci décident d’informer la population : toutes les personnes présentant les mêmes symptômes doivent venir à son laboratoire pour y subir une injection.

 

Les personnes arrivent par centaines et le Docteur doit se faire assister de plusieurs infirmières pour pouvoir soigner tout le monde.

 

Au bout de plusieurs jours le dernier patient est enfin traité.

 

Le Docteur Rechaubow fait figure de héros à Manhattan et bientôt la ville retrouve son calme et cette affreuse histoire de virus ne sera plus qu’un mauvais souvenir.

 

D’ailleurs les projecteurs et les Warner envisagent même d’organiser un pique-nique comme au bon vieux temps.

 

 

 


Le Gardien

De Marion R.  et  Cindy H.

 

 

 

 

 

 

Chapitre 1

 

Yäkivé entra en trombe dans sa tente, plongée dans la pénombre, et se cacha sous sa couchette. Il tendit l’oreille, la respiration haletante. Les pas s’approchaient, menaçants. La lumière envahit brusquement la tente et une voix s’écria : « Trouvé ! ». Yäkivé s’extirpa de sa cachette et se lança à la poursuite des autres enfants.

Le soleil était à son zénith. Soudain : « Ils arrivent, ils arrivent ! », clama une fillette. Dans le ciel de l’île Ludus, d’un rouge éclatant, planaient de grands oiseaux blancs, tenant entre leurs griffes des paniers d’osiers remplis de toutes sortes de friandises et de fruits. Les majestueux volatiles se posèrent et, aussitôt, une horde d’enfants impatients se jetèrent sur les mets attirants.

Après s’être rassasiés, ils regagnèrent chacun leur tente pour faire un petit somme. Un moment passa, la clochette retentit, et les enfants s’élancèrent au-dehors en poussant des cris de joie. Insouciants, innocents, ils se roulèrent dans l’herbe et s’amusèrent jusqu'à ce qu’arrivent à nouveau les grands oiseaux blancs apportant le repas.

 

* * *


Chapitre 2

 

Yäkivé ouvrit les yeux et jeta un coup d’œil furtif vers l’ouverture de sa tente d’où entrait la lumière matinale. Il s’étira longuement. Soudain, il LA ressentit… Cette sensation qu’il éprouvait depuis un certain temps sans pouvoir la nommer… L’ignorant une nouvelle fois, il attendit que la cloche sonnât pour sortir enfin de sa tente.

Yäkivé pensait sans cesse à cette étrange sensation mais ne parvenait jamais à l’identifier. Il n’en parlait jamais à personne car quelque chose en lui lui disait que, de toutes manières, on ne le comprendrait pas.

Après le déjeuner, Yäkivé jouait avec les autres enfants quand, soudain, il s’immobilisa. Encore…encore cette sensation indéfinissable. Yäkivé se sentait perdu, tout en se demandant si ses semblables ressentaient la même chose que lui. Indifférent à ce qui l’entourait, il se dirigea, comme attiré par une force invisible, vers la Forêt Oubliée. Tout en s’y promenant, une nuée de questions lui traversait l’esprit. Dans le sombre feuillage d’un buisson, il aperçut une fleur qu’il tenta de déterrer avec le plus grand soin. Ainsi, il pourrait la replanter ailleurs. Quand il parvint aux racines, il découvrit à son plus grand étonnement un livre sans titre, dont la couleur était aussi noire que la nuit. Il le dégagea de l’étreinte des racines et l’emporta dans sa tente.

Yäkivé parcourut l’ouvrage et découvrit l’existence, jadis, de créatures au savoir et à la taille surprenante, ayant tout pouvoir sur les enfants. Ceci fit naître en lui de la crainte, mais aussi de la joie de ne pas avoir connu ces créatures terrifiantes.

 

* * *


 

Chapitre 3

 

Yäkivé n’osait parler à personne de son  étrange expérience, de peur qu’on se moquât de lui. Pourtant, il devait se résoudre à se confier à quelqu’un.

Pendant le jeu de ce matin-là, Yäkivé avait peu d’enthousiasme. Il pensait sans cesse à l’étrange livre trouvé la veille.

Projecteurs, une petite fille qu’il connaissait bien, le prit à part :

 - Que t’arrive-t-il Yäkivé ? Tu as l’air pensif, ces derniers temps… Je m’inquiète beaucoup pour toi. 

Alors, Yäkivé prit son courage à deux mains et lui révéla ce qui l’inquiétait. Projecteurs fut très compréhensive.

 

Portés par une étrange musique, projecteurs et Yäkivé se promènent dans la forêt. Soudain, un homme tout de noir vêtu apparaît. Il tient LE livre dans ses mains. Des éclairs déchirent le ciel, et une voix menaçante répète sans cesse : « L’ignorance est la seule porte à la vérité… L’ignorance est la seule porte à la vérité… L’ignorance est la seule porte à la vérité… »

 

Yäkivé se réveilla en sueur, tremblant de tous ses membres. Il se précipita dans la tente de projecteurs et lui raconta ce rêve si effrayant. Elle le rassura comme elle le put.

* * *

Chapitre 4

 

Durant toute la journée suivante, Yäkivé fut hanté par son rêve. Le soir venu, projecteurs et celui-ci partirent se promener dans la Forêt Oubliée. Soudain, des éclairs déchirèrent le ciel et, dans la lumière éblouissante, les deux enfants distinguèrent des ombres terrifiantes qui disparurent aussi vite qu’elles étaient apparues.

Pendant le chemin de retour au camp, tous deux furent plus silencieux que d’habitude. Sans un mot, ils regagnèrent leurs tentes respectives. Dans sa couchette, Yäkivé réfléchit longuement au phénomène qui venait de se produire. Ces ombres avaient ravivé en lui un vague souvenir…Un livre…Un rêve…LE LIVRE ! C’était dans LE livre qu’était dessinée une ombre semblable à celles qu’il avait vues !

 

* * *

 

 

 

 

 

 

 

Chapitre 5

 

- Eh, vous avez entendu ça ? Yäkivé et projecteurs veulent aller dans la Forêt Oubliée…

 

Projecteurs et Yäkivé venaient d’annoncer à leurs amis leur départ pour la forêt. Ils partirent donc seuls, sans savoir où ils allaient, mais faisant confiance à la phrase mystérieuse (« L’ignorance est la seule porte à la vérité ») et ayant pour tout bagage LE livre.

Les deux compagnons traversèrent la forêt sans encombre et arrivèrent au bord de l’eau, qu’ils redoutaient tant… Ne voyant aucun autre chemin possible que de traverser l’étendue bleue, Yäkivé chercha dans le livre une solution. Mais le livre indiquait « Qui ne tente rien n’a rien ». Yäkivé, n’écoutant que son courage, trempa timidement un de ses doigts dans l’eau, qui ne lui sembla pas aussi dangereuse qu’on voulait bien le raconter…

Les deux enfants se jetèrent à l’eau, convaincus qu’elle ne leur ferait aucun mal. Avançant du mieux qu’ils pouvaient, ils se retrouvèrent bien vite loin de l’île.

Soudain, l’eau commença à s’agiter et les deux enfants furent entraînés. Se croyant perdus, et ne pouvant plus respirer, ils s’évanouirent…

 

Quand ils rouvrirent les yeux, ils s’aperçurent qu’ils se trouvaient dans une grande salle aux murs de marbre blanc et froid. Ils prirent peur et, affolés, ils se mirent à marteler les murs de leurs poings, avec toute l’énergie qui leur restait. Brusquement, une forte lumière envahit la salle et un homme,  tout de noir vêtu, et le visage dissimulé derrière un masque, entra. Sa voix grinça :

- Je sais le pourquoi de votre venue…

Les deux enfants furent tout d’abord inquiets mais ensuite, le bombardèrent de questions sans relâche. Mais l’homme ne répondit à aucune d’elles, ses seules paroles furent :

- Je sais tout de vous, mais vous ne savez, ni ne saurez rien de m…

- Tu es le fameux Gardien, n’est-ce pas ? trancha Yäkivé, qui l’avait lu dans LE livre et vu dans son rêve.

- D’où tiens-tu cela ?

- Je l’ai lu dans CE livre, dit Yäkivé en le lui montrant.

- Ce livre, est appelé «  Le Livre de La  Vérité », répondit le Gardien, fier de lui apprendre quelque chose (car lui même n’avait pas eu d’enfants).

- Excuse-moi, je ne savais pas… Mais en fait, comment est-on arrivé ici ? Pourquoi sommes-nous prisonniers ? Et toi, que fais tu ici, au juste ? le questionna  Yäkivé.

- Si tu tiens vraiment à savoir ce que je fais, je vais te l’annoncer : je me venge !

- De quoi donc ? Yäkivé fut surpris.

- Des adultes.

- Mais qu’est-ce qu’un « adulte » ?

- Les adultes sont les créatures dessinées dans Le Livre de La Vérité. Ce sont eux qui créent les enfants et qui sont par la suite appelés « parents ». Et comme tu l’as probablement découvert dans le livre, les parents aident les enfants à grandir, les soignent quand ils sont malades. Mais parfois, certains parents sont cruels. Et puisque tu as l’air de vouloir m’écouter, je vais te raconter mon histoire : quand j’étais petit, les adultes se moquaient de moi. Mes parents, qui étaient très chrétiens, me battaient car ils me croyaient possédé par le diable.

- Mais pourquoi ?

- Regarde! Répondit le Gardien qui ôta son masque, et laissant voir aux enfants un visage déformé et immonde.

Ceux-ci poussèrent un cri d’horreur. Yäkivé, courageux, se ressaisit.

- Mais qu’est-il arrivé aux adultes ? demanda-t-il.

- Je les ai punis et ils ne reviendront  plus. Ensuite, j’ai arrêté le temps, pour que vous, les enfants, ne deveniez pas adultes, dit le Gardien, en remettant son masque.

- Mais crois-tu qu’il soit juste de priver les enfants de la présence et du soutien des adultes, seulement pour ta vengeance personnelle ? Et puis, fit remarquer Yäkivé, tu es un adulte aussi, que je sache…

Le Gardien fut surpris de la remarque, il réfléchit longuement. Il commençait à apprécier ce jeune garçon à l’esprit vif. Finalement, il se dit qu’il  commençait à se faire vieux, et, qui pourrait encore le maltraiter à son âge ? Et puis, il était loin de tous, personne ne viendrait le déranger.

-Je crois que tu as raison. Je ne devrais pas ne penser qu’à moi. Je vais donc remettre le temps en marche. Mais je te préviens: tout sera comme si le temps n’avait jamais été arrêté. Vous, les enfants, vous serez bien plus vieux; les adultes mourront, et moi-même serai sûrement non loin de la mort. Regarde, à présent, ces personnes soi-disant “mûres” et “pacifiques”…Car ce que tu vas voir, tu ne l’oublieras jamais…

Le Gardien ouvrit une salle contiguë où étaient enfermés de nombreux adultes. Éblouis par le reflet du soleil sur les murs d’une blancheur éclatante, tous se protégèrent le visage de leur main et clignèrent des yeux pour s’habituer à cette lumière leur semblant si aveuglante. Leur teint avait la pâleur de la mort.

Quand ils aperçurent projecteurs et Yäkivé, ils restèrent cois. Les enfants leur semblaient être des créatures exceptionnelles, d’une taille étrangement basse…

Résolu, le Gardien appuya sur un bouton aussi rouge que le ciel au-dehors. De la salle qui servait de prison aux adultes montèrent des cris déchirants.

Le Gardien lui-même s’effondra sur le sol avec un gémissement atroce qui fendit le coeur à Yäkivé et à projecteurs Ceux-ci assistaient à la scène, interdits, pendant qu’eux-mêmes, enveloppés dans une lumière d’un vert très vif et étincelant, devenaient les adultes qu’ils auraient dû être depuis longtemps.

Yäkivé sentit son corps se faire modeler par des mains invisibles, comme pétri à la manière d’une pâte à pain. Sa peau se détendit et quelques rides apparurent. Il ressentit un picotement sur le menton, et ses épaules se firent plus larges.

La lumière s’atténua. Yäkivé rouvrit les yeux et il resta bouche bée : devant lui, il y avait une jeune femme sublime, dont le corps semblait avoir été taillé par des mains d’anges…Calladis !

Impressionnés, tous deux quittèrent ce lieu sinistre dont le sol était à présent jonché de cadavres, n’en revenant toujours pas.

Calladis pleurait; Yäkivé tremblait, pendant qu’ils réalisaient que rien ne serait plus comme avant.

 

* * *

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Épilogue

 

Quand Yäkivé et Calladis revinrent dans leur île, ils ne reconnurent plus rien. De nombreux adultes ou même des vieillards se promenaient, d’autres enfants qu’ils ne connaissaient pas jouaient à ces jeux qui ne les avaient tant amusés pas plus tard qu’hier. Tout cela semblait bien loin à ce moment-là. Yäkivé et Calladis se mirent en quête d’une nouvelle demeure. Ils s’installèrent dans une grande maison près de là où, dans leurs souvenirs, dans ce passé dont eux seuls se souvenaient mais qui pour les autres n’avait jamais existé, se trouvait le camp.

Une nouvelle vie commençait, un nouvel avenir se tendait à eux…

Leurs vies avaient changé à jamais.

 

* * *

 

 

Fin

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le Tube

 

De Romain P. et James M.

 

Toutes les nations ont disparu. Le monde est divisé en deux blocs : l’Occident et l’Orient. La capitale des Orientaux est Pékin ; celle des Occidentaux est New York.

Toute la planète est devenue une immense mégapole, à l’exception des océans et de quelques espaces naturels terrestres qui subsistent.

Partout sur la planète sont répartis des recycleurs d’oxygène afin de compenser le manque de végétation.

Les Occidentaux ont bâti un gigantesque tube qui relie l’Europe à l’Amérique du Nord. Il est large de dix kilomètres et a trois étages dans lesquels se trouvent deux mille neuf cent quatre-vingt-neuf trains pouvant aller à cinq mille kilomètres par heure sur deux mille neuf cent quatre-vingt-neuf voies différentes. Le Tube est doté de deux routes latérales sur chaque côté où patrouillent des véhicules de sécurité.

Depuis deux cents ans, les deux blocs s’affrontent sur plusieurs fronts. Cependant, des machines venues d’ Ailleurs ont repoussé les humains en Antarctique et établi une base...

Nous sommes en 2274.

 

Le Capitaine John Smith et le lieutenant Jean Dupond patrouillaient sur le Tube en direction de New York.

« On s’arrête au prochain Bouf’Rapid’ ? demanda Dupond

_ Pourquoi pas ? On est en avance, » répondit le capitaine.

La voiture à aéroglisseurs s’arrêta et se gara. Dupond acheta deux sandwiches au plancton animal pour lui et un autre sandwich à la paramécie pour Smith.

Smith, la bouche débordant de paramécies, regardait le ciel quand il s’écria :

« Bon sang ! Qu’est-ce que c’est que... »

Le son de sa voix fut couvert par la déflagration causée par le  missile que Smith venait d’apercevoir.

Dupond courut le plus vite possible dans la direction opposée à l’explosion, mais il fut perforé de bouts de métal et de verre lui déchiquetant le corps. Smith, lui, se précipita vers le bord de la rampe et sauta. Malheureusement pour lui, un énorme bloc de béton l’écrasa avant de s’enfoncer dans l’océan.

 

Au quartier général militaire de l’Occident, les principaux responsables occidentaux se réunirent, afin de déterminer qui avait lancé le missile et de prendre une décision. Les Orientaux étaient sûrement coupables et ils devaient payer. Les responsables décidèrent d’envoyer le commando des Bérets Bleus commandé par Christopher O’Hara et Paolo Fernandez avec pour mission de s’infiltrer dans Pékin pour interroger puis abattre le président ou de savoir au moins qui étaient les responsables de la destruction du Tube.

 

O’Hara rentra dans la salle de réunion des Bérets Bleus. Il fit l’appel réglementaire :

« Azaraoui Mohammed.

_ Présent.

_ Fernandez Paolo.

_ Présent.

_ Gueccelli Matteo.

_ Présent.

_ Mac Coy James.

_ Ici.

_ Vladimirovitch Boris

_ Présent

_ Warrenstein Herman

_ Ici

_ OK ! Tout le monde est là. Préparez-vous pour une mission périlleuse. Je vous attends dans cinq minutes à la salle de briefing. »

 

Quatre minutes plus tard, O’Hara expliquait l’objectif de la mission à ces soldats. Ils passèrent ensuite dans la salle d’embarquement et grimpèrent à bord de leur Cherokee UHT/-6.

Ils voyagèrent jusqu’à Pékin dans la ionosphère pour ne pas être repérés. Lorsqu’ils furent au dessus du QG oriental, ils descendirent au niveau de la troposphère, à la limite où ils pouvaient être repérés mais bas abattus. Ils envoyèrent une salve de quelques milliers d’obus sur le générateur électrique du QG. Quatre-vingt-quinze pour cent des obus furent détruits par la centaine de tourelles à canon plasma qui protégeait le QG mais les cinq pour cent furent suffisants pour anéantir le générateur principal. Ils avaient maintenant cinq secondes pour descendre sur le toit du QG avant que les générateurs de secours ne se mettent à fonctionner et alimentent à nouveau les tourelles qui abattraient sans hésitation n’importe quelle cible volante.

Le Cherokee descendit à toute vitesse sur le toit du bâtiment principal du QG en quatre secondes quarante-trois centièmes.

Le commando descendit du véhicule céleste et Fernandez ordonna à Azaraoui et à Gueccelli de rester sur le  toit et de protéger le Cherokee.

Warrenstein posa une bombe moléculaire ; elle détruirait toutes les molécules du type sur lequel elle était programmée dans un rayon d’un mètre. Elle anéantit donc entièrement la porte en acier de soixante centimètres d’épaisseur qui séparait le commando de l’intérieur du bâtiment.

Les cinq soldats descendirent les quelques marches qui conduisaient dans un couloir. Ils longèrent le couloir et abattirent à l’aide de fusils automatiques à tir guidé une douzaine de gardes qui s’écroulaient à terre avant même que les Bérets Bleus ne l’aperçussent.

Finalement, ils débouchèrent dans une salle remplie d’une douzaine de militaires orientaux. Il y eut une série de coups de feu puis un silence. Mac Coy gisait sur le sol et Warrenstein avait un bras en moins. La seule raison pour laquelle Vladimirovitch, Fernandez, Warrenstein et O’Hara étaient encore en vie était la vitesse incroyablement lente (pour l’époque) des armes des ennemis. O’Hara s’approcha d’un soldat ennemi blessé et lui demanda : « Où est votre président ? ». Le soldat répondit dans une autre langue que Vladimirovitch connaissait et il se chargea donc de faire l’interprète. Le soldat annonça que le président était parti dès qu’il avait su que le QG était attaqué mais que des membres importants étaient toujours là.

« On va essayer de trouver un de ces ‘membres importants’ comme il dit, ordonna O’Hara. On l’achève ou pas ? ajouta-t-il en désignant le blessé.

_ Évidemment. Ce lâche a trahi son bloc pour préserver sa vie. Il ne mérite pas qu’on la lui laisse, répondit Vladimirovitch.

_ Non. On va lui faire faire un gros dodo, » répliqua Fernandez.

Il prit une seringue et injecta dans le bras du soldat une dose de N2 O15 Ca4, un liquide qui faisait sombrer dans un profond sommeil et déstabilisait la mémoire à court terme de façon à faire oublier les souvenirs des trois derniers jours.

Le commando ressortit de la pièce en sachant que des officiers étaient sévèrement réprimandés pour n’avoir pas encore exterminé ou capturé les intrus dans le QG. Ils se dirigèrent vers des escaliers en colimaçon qui descendaient autour d’un pilier vers le centre d’une immense salle, dont le plafond était à huit mètres du sol, sans qu’un mur ne les en séparât. Il y avait seulement un épais muret d’un mètre de haut qui longeait les escaliers de béton.

 

Azaraoui protégeait le Cherokee pendant que Gueccelli surveillait l’entrée du bâtiment qui n’avait plus de porte. Entendant les tourelles faire feu sur des objets qu’on ne pouvait voir depuis le sol, Gueccelli détourna son attention pendant quelques secondes. Ce fut suffisant pour un soldat d’élite oriental qui attendait patiemment dans le couloir du bâtiment pour tirer sur Gueccelli. La balle pénétra profondément dans le bras de Gueccelli. Ce dernier poussa un hurlement de douleur quand la balle explosa en lui arrachant son membre. En effet, les balles des fusils qui constituaient l’armement principal de l’infanterie oriental contenaient du H84 C12 O Fe4, un gaz inoffensif, mais qui explosait au moindre choc lorsqu’il était sous forme de liquide.

Le soldat d’élite monta sur le toit du QG accompagné d’une dizaine d’autres soldats. Ils achevèrent Gueccelli sans que celui-ci eût le temps de réagir.

Cependant, le fusil automatique d’Azaraoui tua un militaire et en blessa un autre, avant d’être atteint par un balle au niveau de la vessie qui lui pulvérisa le bas du ventre et une partie des poumons et des cuisses, séparant le haut du bas de son corps. Dans son agonie, alors que les ennemis s’approchaient du Cherokee, il sortit un petit pistolet.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, cette arme était plus redoutable encore que celle des Orientaux. Ce petit objet pouvait cracher sur ses cibles environ quatre cent balles à la seconde. Il était donc raccordé directement au sac à dos de son porteur, qui contenait plusieurs milliers de balles, de façon à pouvoir déverser son flot de projectiles, sans avoir à s’arrêter pour recharger.

Azaraoui fit feu sans regarder sur les soldats. Il abattit la moitié des soldats et au moment où celui-ci allait être touché une seconde fois par une balle explosive, un de ses innombrables projectiles, qui avaient traversé le groupe de militaires et étaient entré dans le Cherokee, toucha la bombe à fusion atomique de l’hélicoptère actionnant le mécanisme de fusion de l’hélium léger. Au moment où les deux atomes fusionnèrent, une gigantesque explosion se produisit. Heureusement, les recherches avancées dans le domaine de la fusion atomique avaient permis de limiter les dégâts provoqués par ce procédé, sinon la Terre aurait été détruite depuis longtemps.

 

Yaao était soldat d’élite pour les Orientaux depuis une dizaine d’année. Il était en train de courir vers les escaliers qui donnaient sur le toit du QG lorsqu’un événement l’empêcha d’en achever une onzième. Il entendit le bruit d’une explosion très puissante. Tout le bâtiment vibra sous la puissance de la déflagration.

Il monta les escaliers et alla sur le toit. Tout ce qui s’y trouvait était complètement détruit. Il vit aussi que toutes les tourelles les plus proches du toit s’étaient effondrées. Alors qu’il observait le désastre, le toit s’effondra brusquement sur l’étage inférieur, provocant la mort de Yaao et de tous ceux qui se trouvaient à l’étage en-dessous.

 

Le commando se baissa immédiatement en voyant tout le monde qui était dans cette pièce. Il y avait un grand nombre de soldats, d’ingénieurs et de techniciens.

« Les deux gardes ont été abattus, dit une voix. On a un mort et un blessé. Nous allons tenter de pénétr... ahhh !!! »

Vladimirovitch leur traduisait silencieusement la conversation par radio (elle fonctionnait grâce à un ordinateur greffé sur le cerveau.)  lorsqu’ils entendirent un vacarme assourdissant dû à une explosion.

Warrenstein émit quelques borborygmes parmi lesquels on put discerner les mots bombe et fusion. Les autres Bérets bleus saisirent le sens des paroles de Warrenstein et sortirent leurs armes telles que celle qu’Azaraoui avait utilisée un peu plus tôt pour abattre une demi-dizaine de soldats. Dès qu’ils eurent sorti leurs armes, ils furent debout en train de faire feu sur les soldats orientaux, profitant de leur confusion.

Les soldats répondirent quelques secondes plus tard en tirant en direction des assaillants.

 

Warrenstein arrêta de tirer et régla une bombe moléculaire sur le mode dioxygène et la projeta avec son bras restant sur un groupe de soldats orientaux. Instantanément le dioxygène contenu dans leur corps et dans l’air proche d’eux laissa place au vide. Les soldats ne comprirent pas ce qu’il se passait et s’évanouirent quelques secondes plus tard. Ils ne moururent pas car le dioxygène qui se trouvait à proximité vint vite se mélanger avec les gaz qui restait dans cette petite zone.

Warrenstein poussa un juron lorsque quelque chose lui pénétra dans le ventre. Cet objet n’était autre qu’un bout du crâne de Vladimirovitch qui venait d’exploser. Le soldat retira avec dégoût le morceau d’os de son ventre et descendit les escaliers en évitant de se faire tirer dessus. Il avait repris son fusil automatique et cela lui permit d’abattre deux soldats qui grimpaient les marches.

En bas des escaliers, trois ingénieurs furent tués par son arme qu’il désactiva. Il sortit son pistolet et le pointa sur une administratrice qui tentait de s’échapper par une des trois portes. Lorsque l’administratrice s’en aperçut, elle arrêta de bouger et Warrenstein tira sur un soldat qui s’approchait et tua aussi deux autres soldats à cause des trois cent cinquante balles qui avaient traversé sa première cible. L’administratrice en avait profité pour courir vers la porte la plus proche. « Même pas dans tes rêves ! », s’exclama Warrenstein en tirant une centaine de balles sur les ingénieurs qui s’enfuyaient devant elle. Les six civils s’effondrèrent aux pieds de la fugitive. Soudainement, le vacarme produit par le tir incessant disparut. O’Hara apparut en bas des escaliers. Quand il vit l’administratrice, il s’écria :

« Bien joué. Fernandez et ‘Vlad’ se sont fait descendre. On a flingué tous les soldats qu’il y avait. Heureusement qu’ils ont mis un mur aussi épais. Il a retenu trois quarts des balles tirées contre nous. »

Ils entraînèrent l’administratrice dans une pièce à côté. O’Hara monta la garde pendant que Warrenstein essaya d’interroger l’administratrice.

« Est-ce que vous avez lancé un missile contre le Tube ? demanda Warrenstein. Ne me faîtes pas croire que vous ne parlez que Russe. Je sais que vous parlez Anglais, Français ou Allemand, alors répondez-moi rapidement.

_ Nous n’avons jamais envoyé de missile contre votre Tube, répondit-elle. Notre missile aurait été repéré par vos tourelles de défense sous-marine et aurait été détruit avant d’atteindre le Tube.

_ Vous croyez que je vais avaler ça ?

_ C’est les Machines qui sont responsables.

_ Évidemment ! s’exclama Warrenstein d’un ton ironique. Ca fait cent cinquante ans que ces machins venus d’on ne sait où n’ont rien fait !

_ Vous ne comprenez donc pas qu’ils ont fait ceci pour qu’on se batte entre nous et se faire oublier ?

_ Je pense qu’elle a raison, lança O’Hara qui avait déjà abattu une dizaine de soldats. On s’en va et on retourne vite chez nous pour expliquer la situation à nos supérieurs avant qu’il ne soit trop tard.

_ Tu ne vas quand même pas croire ces âneries ? Ca n’a aucun sens ! s’exclama Warrenstein.

_ J’ai dit qu’on partait, répliqua O’Hara.

_ Je refuse. »

Après avoir asséné un violent coup de pied dans le nez de Warrenstein, O’Hara demanda à l’administratrice où se trouvaient les vaisseaux orientaux.

Il partit en courant vers l’endroit que lui avait indiqué l’administratrice. Il arriva devant la porte sans croiser personne. Il ouvrit la porte et se retrouva nez à nez avec un général oriental. Avant que l’un d’eux ait le temps de réagir, une voix amplifiée résonna et annonça l’évacuation du QG. O’Hara sentit alors un vigoureux coup dans le ventre le faire tomber à terre. Il vit le fusil du général se pointait sur sa poitrine et au moment où son propriétaire s’apprêtait à faire feu, celui-ci s’effondra en gémissant. O’Hara se releva, encore en vie grâce à un petit gadget qui stoppait temporairement la circulation sanguine de la personne la plus proche autre que son propriétaire. Malheureusement, cet objet était difficile à fabriquer et ne pouvait être utilisé qu’une seule fois.

Alors que le sang commençait à circuler à nouveau dans les artères du général, ce dernier remua et actionna un émetteur de rafales sonores. Le son dégagé était tellement puissant que tous ceux qui se trouvaient à proximité avaient les tympans percés et volaient à plusieurs mètres de l’endroit où ils se trouvaient précédemment. O’Hara fut projeté à travers la porte et s’écrasa sur le sol. Le général avait utilisé sa dernière chance pour essayer de sauver sa vie. Cependant, la rafale l’avait expulsé contre un mur que sa tête avait touché avant le reste de son corps.

O’Hara se releva en grognant et se déplaça en boitant vers l’hélicoptère le plus proche. Ce vieux modèle datait de 2116 ; il fut donc facile pour le Béret Bleu de pénétrer à l’intérieur et s’envoler en dehors du QG.

 

Warrenstein se releva avec un nez et un bras en moins. Alors que l’administratrice s’enfuyait, il sortit le même gadget que son supérieur allait utiliser pour vaincre un général et l’actionna. Sans émettre le moindre son, l’administratrice tomba lourdement. Warrenstein s’approcha d’elle et marmonna une série d’insultes et de jurons avant de casser la colonne vertébrale de la femme immobile d’un coup de talon dans la nuque. Une seconde plus tard, une balle explosive pénétra dans le talon de Warrenstein et une autre suivit dans les intestins.

 

O’Hara s’envola dans la troposphère, sachant que les tourelles étaient désactivées pour que les Orientaux puissent aussi s’en aller par les airs. Il vola jusqu’à New York dans la stratosphère car d’autres tourelles se trouvant ailleurs pouvait être activées et faire feu jusque dans la troposphère. Le dernier Béret Bleu aurait préféré volait dans la mésosphère ou même dans l’exosphère si c’eût été possible avec cet hélicoptère.

Quand il arriva à New York, il descendit au QG et envoya un message à l’aide de la radio de l’hélicoptère à son supérieur pour demander à ce qu’on le laisse entrer dans le QG sans se faire attaquer. Après cela, il pénétra dans la salle d’embarquement et sortit du véhicule volé.

Il se rendit dans une salle de réunion où se trouvait un grand nombre de gens importants.

« Vous êtes seul ? demanda un administrateur.

_ Je ne peux pas vous entendre. Une rafale sonore m’a bousillé les tympans », répondit O’Hara.

L’administrateur écrivit la question mentalement et sa pensée fut projetée sur le mur qui faisait face à O’Hara grâce à un ordinateur comprenant les réactions au niveau du cerveau et pouvant les traduire.

« Je suis le seul survivant, dit O’Hara. Cependant, ce ne sont pas les Orientaux qui on fait sauté notre tube. Ce sont les Machines.

_ Quoi ?! Je refuse d’y croire ! s’exclama un militaire.

_ C’est pourtant la vérité, répliqua O’Hara qui avait deviné les paroles du militaire.

_ Si c’est la vérité, nous avons fait une grosse bêtise. Nous avons envoyé la plupart de nos troupes au combat contre les Orientaux. »

Une administratrice pensa une question qui fut instantanément projeté contre le mur. Le Béret Bleu lut et répondit : 

« Je sais juste que les Orientaux ne sont pas impliqués dans l’explosion du Tube et que c’était une diversion pour nous attaquer.

_ Très bien. Nous allons nous préparer pour les accueillir, dit un général.

_Emmenez le général O’Hara au Centre Médical, » ordonna le président.

 

O’Hara était assis dans une salle où une infirmière lui injectait un produit pour désenfler sa cheville. Cela faisait cinquante minutes qu’il se trouvait au Grand Centre Médical de Boston. C’était le seul hôpital américain où on pratiquait des opérations permettant de créer de nouveaux tympans pour les patients.

Soudain, la porte en acier de la salle vola en éclats, pulvérisée par un tir de fusil. Des bouts d’acier volèrent à travers la pièce. O’Hara eut le réflexe de plonger à terre, mais pas l’infirmière qui fut décapitée par une fine plaque d’acier qui alla percuter le mur à toute allure.

Le Béret Bleu se releva, sortit de la salle et regarda. Un groupe de soldat combattait avec férocité une armée de Machines. Les balles des fusils automatiques rebondissaient contre les robots sans même les affecter.  « Pourquoi est-ce qu’ils ont besoin de venir jusqu’ici, alors que quelques missiles feraient l’affaire, » se demanda O’Hara.

Il sortit un fusil qu’il avait ‘emprunté’ à un soldat oriental et fit feu sur la machine la plus proche. La balle rebondit contre la peau métallique, mais ce fut suffisant pour faire exploser le liquide de la balle. Le robot tomba et recula de quelques mètres. O’Hara se précipita sur lui et dégaina un couteau capable de percer à peu près n’importe quoi. Il trancha rapidement la tête de l’androïde en espérant que c’était son centre vital. Mais ça ne l’était pas. La machine utilisa ses bras et propulsa O’Hara en arrière. Ce dernier jura plusieurs fois et se releva, tout comme le robot, en sentant une douleur assez forte dans les côtes.

O’Hara se retourna et vit que les soldats, qui n’avaient pas été broyés comme de vulgaires insectes par leurs opposants, avaient pris la fuite. Il pensa aussi que c’était la bonne solution et monta les escaliers qui se trouvait derrière lui pour se retrouver sur le toit du bâtiment. Un grand nombre d’hélicoptères médicaux s’y trouvait et trois machines s’affairaient à les faire tomber en bas du bâtiment.

Alors qu’elles étaient au bord du toit et qu’elles venaient de faire basculer un lourd engin dans le vide, O’Hara leur tira dessus. Les explosions les firent voler en l’air et retomber en bas du toit.

Malgré leur solidité, leur masse énorme, en plus de la vitesse, les fit s’écraser minablement sue le sol et les réduisit en tas de ferrailles.

O’Hara se jeta dans l’hélicoptère le plus proche. Le cadavre d’un homme gisait sur le siège à côté du sien. Le militaire décolla. Il utilisa la radio pour communiquer avec son QG :

« O’Hara ! Vous devez vous rendre immédiatement en Antarctique. Nos hommes qui s’y trouvaient ont découvert que les robots étaient contrôlés par une immense tour. C’est plus compliqué que ça, mais faîtes sauter la tour et les machines seront hors d’état de nuire.

_ Que sont devenus les hommes s’y trouvant ? demanda O’Hara à l’administratrice.

_ Nous n’en savons rien. Nous essayons d’envoyer le plus d’hommes possibles pour faire exploser la tour. L... »

La communication fut coupée.

Trois heures plus tard, O’Hara se situait dans la ionosphère, au dessus de l’Antarctique. Il savait qu’il y avait une cinquantaine de personnes dans des caissons cryogéniques dans l’hélicoptère. Il savait que les robots savaient peut-être qu’il se trouvait là. Il savait qu’il pourrait être abattu avant même de pouvoir réagir. Il savait que l’avenir des humains dépendait probablement de lui. Et enfin, il ne le savait pas, mais il  restait moins d’un millier d’humains sur Terre et la raison pour laquelle les machines ne s’étaient pas contentées d’envoyer était le fait qu’elles voulaient conserver les ressources restantes.